La résistance aux médicaments est un problème croissant dans la médecine moderne. Elle touche pratiquement toutes les disciplines cliniques, bien qu'elle soit le plus souvent mentionnée dans le traitement des infections et la thérapie anticancéreuse. En neurologie, l'un des problèmes actuels est l'épilepsie pharmacorésistante. Grâce aux progrès de la science fondamentale, de nouveaux médicaments permettant de surmonter le mécanisme de la multirésistance aux médicaments pourraient bientôt entrer en clinique.
Le métabolisme de la plupart des médicaments, ou plus largement des xénobiotiques, comprend trois phases : I - l'oxydation, la réduction et l'hydrolyse, II - le couplage et III - le transport. Jusqu'à récemment, l'accent a été mis sur les phases I et II, en particulier sur le système du cytochrome P450. Cependant, l'importance des "transporteurs de xénobiotiques", qui peuvent empêcher le passage des médicaments dans un compartiment particulier de l'organisme ou même les pomper activement hors de ce compartiment, est désormais de plus en plus reconnue. Ainsi, même le meilleur médicament n'est d'aucune utilité si, en raison de l'activité de ces protéines, il ne peut pas agir sur son site cible. L'inhibition du transport des médicaments au niveau cellulaire est l'une des raisons de la résistance aux médicaments multiples (MRD).
Le transporteur de césnobiotiques le plus connu est la P-glycoprotéine (P-gp). Il s'agit d'une protéine appartenant à la famille des protéines ABC (ATP binding cassette), dont l'autre nom est ABCB1. On la trouve dans les membranes cellulaires, notamment celles des tissus placentaires (où elle participe au mécanisme de protection du fœtus), des canaux biliaires et pancréatiques, des tubules rénaux en aval et, ce qui est important pour les neurologues, de l'endothélium des capillaires cérébraux, des astrocytes, de la microglie et des neurones. L'activité de la glycoprotéine P n'est pas toujours souhaitable (elle constitue une "barrière sang-cerveau supplémentaire"). Elle peut réduire ou même éliminer la perméabilité des médicaments antiépileptiques au foyer épileptogène et entraîner ainsi une résistance aux médicaments dans l'épilepsie (chez environ 40 % des patients).
Sur la base de ces connaissances, il a été décidé d'introduire une nouvelle stratégie thérapeutique impliquant l'inhibition de la P-glycoprotéine. Un inhibiteur non compétitif de la P-glycoprotéine appelé tariquidar (XR9576) a déjà été développé et fait actuellement l'objet d'essais cliniques. Il s'agit d'un exemple d'incarnation du concept moderne de médecine translationnelle, c'est-à-dire d'une médecine dans laquelle les découvertes scientifiques passent directement de la "table du laboratoire" au "chevet du patient".